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Le vote, les partis, la politique et… la Ligue de l’enseignement

En ce lendemain d’élections présidentielles peut-être partageons-nous, convictions personnelles partisanes mises à part, un commun sentiment de malaise. D’un côté, domine le soulagement de voir éliminée la candidate de l’extrême-droite. De l’autre, sourd un réel effroi devant les fractures sociales et politiques qui transpirent des urnes. Et, au final, perce une interrogation de fond : le monde associatif peut-il se cantonner à être le spectateur, fut-il éclairé, des dysfonctionnements désormais patents de notre système démocratique ?

Comme l’analyse Jean-Paul Martin (voir son article dans les IEM et, pour une analyse plus approfondie, le chapitre “Un objet politique à penser” extrait de son ouvrage La Ligue de l’enseignement, une histoire politique), l’objet politique est pour la Ligue de l’enseignement, dès ses origines, un enjeu plus complexe que ne le laissent paraître la fameuse injonction à “former des électeurs” ou encore le principe inscrit dans nos statuts du refus de “toute action partisane dans le domaine politique”.

Née avant les partis, la Ligue de l’enseignement en a bien soutenu le développement, à l’amont comme à l’aval. Elle a accompagné, depuis le “parti scolaire” qui était le sien, la formation des électeurs mais également… l’accueil de militants. Elle a fourni aussi aux organisations partidaires, comme on l’oublie souvent, non seulement des propositions, mais aussi des lieux d’expérimentation et de convergence voire… des candidats. Ainsi, tout en récusant une allégeance partisane qui aurait attisé les conflits entre partis républicains, la Ligue a constamment assumé un rôle politique à des fins de négociation et de consensus au nom même de la République.

Travaillée en 2016 (Faire société) et réaffirmée clairement lors du congrès de Marseille de 2019 (Faire République), cette position d’”acteur politique” s’est trouvée contrariée par les tensions internes de la confédération. Notre prochain congrès devrait permettre de faire avancer cette question à travers la réforme de la gouvernance actant le socle d’une unité retrouvée

Qu’est-ce, en effet, qu’un acteur politique à l’heure où les paradoxes du vote se multiplient, comme l’atteste le piège électoral de cette présidentielle qui interdit l’expression de la diversité politique ou comme en témoigne une abstention de plus en plus militante ? Qu’est-ce qu’un acteur politique quand les partis supposés construire et incarner le débat contradictoire sont en risque de quasi-effacement ? Qu’est-ce qu’un acteur politique devant un hyper-présidentialisme où le “nous tous” se résume à l’illusoire affirmation d’un seul ? Qu’est-ce qu’un acteur politique quand “l’indépendance dans l’interdépendance” avec l’État (Jean-Paul Martin) engage autant nos moyens de fonctionnement que nos valeurs ?

Il s’agit là de questions majeures à discuter collectivement. Le conseil d’administration le fera directement avec les responsables fédéraux dès la semaine prochaine. Mais il s’agira aussi d’en débattre avec les candidats et plus encore avec les associations affiliées et les bénévoles, à l’occasion de la diffusion de notre plaidoyer au long de la campagne des législatives.

 

Daniel BOYS
Président de la Ligue de l’enseignement du Pas-de-Calais